4 élus du Lot expliquent leur vote pour la LGV Toulouse Bordeaux

29,4 millions d’€ d’aides du Département du Lot pour la LGV Bordeaux Toulouse ; Raphaël Daubet, Vincent Bouillaguet, Caroline Mey-Fau et Frédéric Gineste, justifient leurs votes.

 
Les élus du Lot, (1 contre et 6 abstentions) ont voté en faveur de la construction de la LGV Toulouse – Bordeaux. (©DR )

La réaction des conseillers départementaux du Lot, qui ont voté l’enveloppe de 29,4 millions d’€ en faveur du Grand Projet Sud-Ouest (GPSO), portant notamment sur la construction de la LGV Toulouse Bordeaux, semble davantage répondre à un souci de solidarité régionale autour de Carole Delga, présidente de la Région Occitanie, qu’à une défense des intérêts du Lot.

Les arguments avancés par les élus du Département qui ont pris la parole pour faire part de leur motivation de voter une aide (29,4 millions d’€ étalés sur 40 ans) en faveur de la construction de la LGV Bordeaux-Toulouse, s’appuient essentiellement sur le fait qu’il s’agirait en quelque sorte d’une contrepartie permettant de garantir les engagements pris en faveur de la modernisation de la ligne POLT. Or, jusqu’ici, jamais les deux dossiers n’avaient été liés. Par ailleurs, il est surprenant de constater qu’aucun élu n’a pris position par rapport à la mise en place d’une taxe qui affectera les contribuables résidant à moins d’une heure de route de la gare TGV de Montauban (voir encadré).

Raphaël Daubet : un oui « tourmenté »

Raphaël Daubet, conseiller général de Martel (en binôme avec Gaëligue Jos), se montre convaincu de l’intérêt du Grand Projet Sud-Ouest (GPSO). Pour autant, l’élu du nord du Lot ne cache pas son inquiétude quant au risque d’affaiblissement des investissements sur la ligne POLT. Raphaël Daubet réclame des garanties en faveur de la ligne POLT.

Raphaël Daubet
Raphaël Daubet (©DR)

– Raphaël Daubet : « Je vote « pour » ce dossier, parce qu’il soulève une question d’aménagement du territoire et ma compréhension personnelle du fonctionnement du territoire régional en tant qu’ancien élu régional, m’a convaincu de l’importance du rôle de locomotive, économique, universitaire, médical, culturel, de la métropole régionale qu’est Toulouse. J’ai compris que pour jouer ce rôle, il est important, pour lui garantir son rayonnement, qu’elle ait une attractivité compétitive. Et bien sûr la question de la connexion rapide à Paris et la question de l’interconnexion aux autres métropoles régionales sont également déterminantes. C’est pour ces raisons-là que je vais voter Pour. Néanmoins, je ne voudrais surtout pas laisser à la postérité l’image d’un élu local qui n’aurait pas été lucide ou clairvoyant sur cette difficile décision politique, parce qu’elle a évidemment alimenté nos débats et tourné dans nos têtes durant plusieurs jours. Il est important pour moi que soit consigné dans le procès-verbal de cette séance le risque que j’identifie clairement. C’est-à-dire que le soutien que nous apportons à la LGV pour des raisons légitimes de stratégie régionale, fait peser d’un autre côté un risque majeur sur la desserte future d’une partie du territoire régional, en l’occurrence la moitié nord du département du Lot. Je pense qu’il est évident que la mise en service un jour de la LGV Toulouse-Bordeaux aura pour effet mécanique la diminution de la fréquentation sur la ligne POLT. Or nous savons pertinemment que l’abandon des services publics, de leur entretien, de l’effort d’investissement s’appuie toujours sur l’argument de la fréquentation. Cela s’est vérifié pour bon nombre de services publics. À mon avis, le risque que nous prenons aujourd’hui, c’est bien celui d’un affaiblissement de la ligne POLT et donc corrélativement d’un enclavement ou d’un isolement ferroviaire d’une partie du territoire lotois, qui est aussi une partie du territoire régional et du sud de la Corrèze. Ce risque à mon sens exige des engagements en contrepartie. On prend ce risque parce qu’on a des raisons de stratégie régionale de le faire. Mais il faudrait qu’en contrepartie il y ait des engagements de tous les partenaires en faveur de la ligne POLT, il en a été cité quelques-uns, mais à mon avis ils sont encore insuffisants et il faudra aller au-delà. Également je crois pour ma part, à l’aérodrome Brive-Vallée de la Dordogne parce qu’il y a des enjeux de mobilité et d’équité territoriale qui se feront jour et si l’on veut être demain à la hauteur de ces enjeux, il faudra que nous soyons tous capables de mettre les moyens pour permettre que ces territoires du nord du Lot et du sud Corrèze soient également desservis et aient accès à des mobilités. Je ne voudrais pas que l’on puisse penser qu’on soutient par faiblesse cette demande qui nous est faite par la Région. À mon sens, elle peut s’expliquer légitiment mais on n’est pas non plus ignorants des risques que nous faisons peser à notre territoire. »

Vincent Bouillaguet : un oui « mesuré »

Vincent Bouillaguet, conseiller général Cahors 2 (en binôme avec Nelly Ginestet), observe que pour la LGV les milliards sont collectés en quelques semaines, alors que pour la ligne POLT, les financements peinent à se confirmer…

Vincent Bouillaguet
Vincent Bouillaguet (©DR)

« Lors d’un précédent débat, j’avais demandé que des jalons soient définis, de façon à ce que nous soyons rassurés sur l’avancement des travaux sur la ligne POLT. S’il y a moins d’un an, le ministre des Transports a sanctuarisé les enveloppes afin de régénérer les voies d’ici 2025, à hauteur de 1,6 milliard d’€ (450 millions d’€ pour les nouveaux trains qui sont encore en construction, 140 millions d’€ pour améliorer la sécurité sur la ligne…). Il ne s’agit que de remise à niveau après des décennies d’abandon.

 

Par contre, pour la modernisation de la ligne POLT, qui elle seule permettra de raccourcir les temps de trajets, Jean-Baptiste Djebbari, ministre des Transports, avait annoncé qu’il s’engageait à ce que l’État prenne en charge les deux tiers des 385 millions d’€ nécessaires à la modernisation de la ligne POLT, soit 257 millions d’€, le tiers restant devant être supporté par les régions traversées par la POLT, soit 128 millions d’€, à charge pour chacune d’elles. Pour chacune des Régions concernées, le financement complémentaire se tient dans l’épaisseur du trait… Alors que l’on a réuni 10 milliards d’€ en quelques semaines pour la LGV, je pense que l’on doit pouvoir y arriver. Je souhaite que par un parallélisme des formes avec le financement du GPSO, la contractualisation soit rapide entre l’État et les Régions pour le financement de la modernisation de la ligne POLT. Savons-nous si l’Occitanie s’engage dans ce financement ?

Je souhaite que nous avancions concomitamment sur les deux projets et que nous ayons des assurances… Ceci concerne des travaux entre Paris et Limoges qui devraient faire gagner entre 30 et 40 minutes s’ils étaient réalisés. Je souhaitais que cette assurance soit prise dans la délibération, je veux bien voter, mais qu’on ne nous abandonne pas ! »

Caroline Mey-Fau : un oui « convaincu »

Bien qu’elle déplore au final, que ce ne soit pas l’État qui prenne en charge ce projet, Caroline Mey-Fau, conseillère générale de Gramat (en binôme avec Alfred-Mathieu Terlizzi), approuve pleinement ce projet GPSO.

Caroline Mey-Fau
Caroline Mey-Fau (©DR)

– Caroline Mey-Fau : « Je répète que la création de cette ligne de TGV va dans le sens de l’histoire, c’est de l’aménagement du territoire. Quand la DATAR a créé les 8 métropoles d’équilibre, à l’époque où l’on parlait de Paris et du désert français, il s’agissait de les relier entre elles. Bordeaux et Toulouse sont les seules qui ne sont pas encore reliées. Pour ma part, c’est un très bon projet et quand notre collègue Francesco Testa parle d’un manque de services publics, il me semble que la région Occitanie a mis le paquet sur la mobilité et les trains régionaux circulent de plus en plus. Quant au prix du billet du TGV qui sera à l’usage des acteurs économiques et cela facilitera le dynamisme de l’économie, il faut savoir que l’on peut faire le trajet Bordeaux – Paris en TGV pour une vingtaine d’euros et je pense que cela sera ouvert pour tous les usagers avec Ouigo (Ouigo est le nom du service commercial ferroviaire à bas coûts). Nous voterons ce projet ferroviaire qui est global, qui nous intéresse et qui met en parallèle la modernisation de notre ligne POLT et cette LGV entre Toulouse et Bordeaux. En tout cas c’est une mission de l’État que nous devons nous débrouiller pour mettre en œuvre, on ne peut que le déplorer. »

Frédéric Gineste : un oui « enthousiaste »

Frédéric Gineste, conseiller général de Gourdon (en binôme avec Édith Lagarde) considère pour sa part, que le projet de la LGV Toulouse Bordeaux se présente comme une chance à saisir, pour la ligne POLT.

Frédéric Gineste
Frédéric Gineste (©DR )

– Frédéric Gineste : « Issu du canton de Gourdon, je me sens très concerné. Je suis ravi parce que je constate que tout le monde est mobilisé, tout le monde est soucieux pour l’avenir de cette ligne POLT. Pour mémoire, j’ai manifesté depuis 2007, je vois que nous sommes tous d’accord, pensons à notre ligne POLT. Ce qui m’a convaincu et je le répète, j’ai l’impression que l’on revit des débats ; M. Boisseleau qui est un expert, m’a expliqué en long, en large et en travers, qu’il y a une opportunité, une perche tendue pour la POLT, sachons la saisir ! »

Précision : Serge Rigal, président du Département du Lot, a déclaré au sujet des garanties concernant la ligne POLT : « Nous avons des engagements des Régions pour la ligne POLT, certes, il faut à présent que ces mêmes Régions signent, mais je suis tranquille à ce sujet ».

(*) À Uzerche le 23 octobre 2021, les trois vice-présidents des Régions Occitanie, Nouvelle Aquitaine et Centre Val de Loire, ont émis le vœu de s’engager financièrement pour moderniser la ligne POLT.

Une taxe pour les contribuables résidant à moins d’une heure de route de la gare TGV de Montauban

Mi-novembre 2021, l’Assemblée nationale votait la création d’une taxe spéciale d’équipement (TSE)* applicable dès 2023 pour financer la LGV Bordeaux-Toulouse (adoptée à l’Assemblée nationale dans le cadre du projet de loi de finances 2022 au travers d’un amendement soutenu par le gouvernement).
Sont concernés par cette taxe, les résidents d’une commune de Nouvelle Aquitaine et d’Occitanie, située à moins d’une heure en voiture d’une gare de la future ligne à grande vitesse qui desservira les villes de Bordeaux, Agen, Montauban et Toulouse.
Seront redevables de cette TSE, les contribuables et les entreprises qui sont touchés par la taxe foncière, la taxe d’habitation sur les résidences secondaires et les sociétés assujetties à la cotisation foncière des entreprises. Seuls les locataires qui ne paient pas la taxe foncière seront exemptés.
*Les personnes et entreprises concernées verront apparaître à partir de janvier 2023 une ligne supplémentaire TSE sur leur feuille d’impôt. Cette nouvelle taxe devrait représenter 3 à 4 € de plus par an et par foyer.

Article paru dans La Vie Quercynoise du jeudi 6 janvier 2022.

Actu Lot Jean-Claude Bonnemère