Affronter la crise aéronautique
Ce 17 juillet, à Cambes, dans les locaux de la CCI du Lot, Laurence Tur, sous-préfète de Figeac, et Vincent Labarthe, vice-président de la Région Occitanie et président du Grand Figeac, ont accueilli les entreprises de l’aéronautique à l’occasion d’un comité de pilotage départemental destiné à développer le plan de relance du secteur, instance spécifique mise en place par rapport à la situation et à l’impact de la crise sanitaire. Il se déclinera autour d’un comité de pilotage aéronautique et des comités techniques dédiés.
« C’est une 1ère initiative locale pour favoriser le dialogue et l’accompagnement des dossiers d’entreprises de cette filière par la Région, l’Etat, les intercommunalités et les autres partenaires. La Région, pour sa part, va accompagner les entreprises en difficulté grâce au plan de Relance Aéronautique pour l’Emploi en mettant des accents particuliers :
– sur la formation pour la préservation des compétences et des emplois
– sur la diversification de l’activité des entreprises et notamment via le développement de l’innovation et la recherche
– pour améliorer et adapter nos outils financiers en cohérence avec les besoins du territoire.
– pour faciliter la relocalisation des entreprises.
On a bien vu combien un petit objet comme un masque a généré des difficultés d’approvisionnement et pour sa fabrication à un certain niveau de production. Sachons donc tous tirer les leçons de cette crise. Tout l’intérêt de territorialiser cette opération est de faire l’accompagnement le plus proche et le plus efficace possible » a souligné Vincent Labarthe.
> En Occitanie, la filière aéronautique occupe plus de 80 000 emplois qualifiés et génère des emplois indirects pour un total estimé de 200 000 personnes. Cela représente 40 % de l’emploi industriel régional. Dans le Lot, ce sont plus d’une quarantaine d’entreprises qui ont déclaré travailler dans le secteur de l’aéronautique. Ces entreprises vont de 1 à plus de 1100 salariés, dont près de 90 % de TPE ou PME. Plus de 3 300 personnes sont employées dans ces entreprises : le Lot représente plus de 4 % de l’emploi salarié de l’aéronautique pour la région Occitanie. Ces entreprises proposent à la fois des produits propres, mais réalisent également pour la plupart de la sous-traitance pour les grandes entreprises de l’aéronautique, de la défense, et du spatial. Selon Pôle Emploi, le bassin d’emploi de Figeac représente 83 % de l’emploi aéronautique dans le Lot, suivi par celui de Souillac (9%) et de Cahors (8%). L’an passé, ce sont 70 emplois qui avaient été créés dans la filière aéronautique, soit une hausse de 1,8 % de l’emploi salarié aéronautique du département.
> La filière aéronautique a déjà bénéficié des mesures mises en place par l’Etat pour l’ensemble des entreprises nationales. A la mi-mai, 1,5 milliard d’euros de prêts garantis par l’Etat (PGE) ont déjà été accordés aux entreprises de la filière de construction aéronautique et spatiale. Au sein du secteur de fabrication de matériel de transport hors industries automobiles, qui inclut la filière aéronautique, 651 sites industriels ont demandé l’autorisation de mettre en place l’activité partielle depuis le 1er mars pour plus de 110 000 salariés. Dans le Lot, ce sont 16 établissements qui ont été autorisés à bénéficier du dispositif d’activité partielle et 15 qui ont effectivement obtenu une indemnisation au titre de l’activité partielle, pour un montant de 2 915 000 euros – soit plus de 13 % du total du montant indemnisé pour l’activité partielle dans le Lot (21,8 millions d’euros). 73 % des effectifs du secteur de l’aéronautique ont été placés en activité partielle à un moment depuis le mois de mars. Enfin, six entreprises lotoises ont bénéficié des mesures de bienveillance fiscale dans le cadre du Covid-19 pour un montant de plus d’un million d’euros dans le Lot (délais accordés en matière de paiement d’impôt sur les sociétés, de cotisation foncière des entreprises et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises).
Y a-t-il une solution à long terme?
Le secteur de l’aviation, qui s’est engagé à réduire de moitié ses émissions de CO2 en 2050, va devoir lever un certain nombre d’obstacles pour atteindre cet objectif. Le gouvernement français veut par exemple voir voler dans le ciel un avion propulsé par l’hydrogène d’ici à 2035.
Sous la pression de l’opinion publique depuis des mois pour ses émissions polluantes, le transport aérien a devant lui une longue route vers un avion propre, avec des caisses désormais vidées par la tempête du Covid-19.
- Quelles émissions et quels engagements pour réduire les émissions de CO2?
L’aviation représente environ 2% des émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO2), selon l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI).
Un total de 4,5 milliards de passagers (+4,2%) ont été transportés en 2019 dans le monde, selon l’Association internationale du transport aérien (Iata).
Avant la pandémie, le secteur s’était engagé à réduire de moitié ses émissions de CO2 en 2050 par rapport à 2005, alors même qu’il tablait parallèlement sur un doublement du trafic dans les 15 à 20 ans. L’Iata affirme qu’il tiendra cet engagement.
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Selon un rapport publié en janvier par trois organisations européennes, dont l’Agence de l’environnement AEE, les émissions dues au secteur sur le continent augmentent, même si les progrès technologiques ont permis de compenser en partie l’effet de la croissance du trafic.
Ainsi, le nombre de passagers des vols commerciaux a augmenté de 20% entre 2014 et 2017 en Europe et les émissions de CO2 de 10% selon ce rapport.
- Quel impact du coronavirus?
Mises à l’arrêt et financièrement exsangues, les compagnies ont accéléré la sortie de leur flotte des avions les plus anciens et donc les plus polluants.
« Même si la capacité à financer le renouvellement d’avions des compagnies est plus faible -et elles vont chercher à retarder le renouvellement- elles ont de toute façon des surcapacités qui vont les amener à sortir de leur flotte leurs avions les plus vieux et les moins performants. […] Cela va améliorer la performance moyenne de la flotte », commente Bertrand Mouly-Aigrot, expert en transport aérien au cabinet Archery Strategy Consulting.
La compagnie américaine Delta Airlines a ainsi mis un point final à la carrière du biréacteur MD-90, Lufthansa et Air France ont abandonné plus tôt que prévu leurs A340 et A380, gros porteurs gourmands en kérosène et pollueurs. La compagnie française a en outre dû prendre des engagements fermes de réduction de ses émissions polluantes en contrepartie de l’aide de l’État.
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La reprise du trafic pressentie comme très lente fera baisser mécaniquement les émissions du secteur, qui ne devrait pas retrouver son niveau d’activité de 2019 avant 2023.
- Comment réduire les émissions?
Chaque nouvelle génération d’avion permet de réduire l’empreinte carbone de 15%, constate-t-on dans le secteur.closevolume_off
Moteurs moins gourmands, matériaux plus légers… « On considère qu’on gagne 1% de technologie par an », selon le patron du motoriste Safran Philippe Petitcolin.
Un rythme insuffisant pour tenir les engagements pour 2050. Il va donc falloir trouver des ruptures technologiques.
La propulsion électrique grâce à des batteries n’est pas envisageable, leur poids les disqualifiant. Les biocarburants, issus de la biomasse notamment, existent déjà mais leur coût est encore bien trop élevé par rapport au kérosène, qui est l’un des premiers postes de dépenses des compagnies aériennes.
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Restent la propulsion hybride et l’hydrogène. C’est la voie choisie par le gouvernement français, qui pousse la filière aéronautique à développer un avion régional à propulsion hybride, qui devrait entrer en service à la fin de la décennie et permettrait de diminuer de 30% les émissions de CO2, puis d’un « moyen-courrier décarboné » pour 2035, fonctionnant à l’hydrogène.
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Jérôme Bouchard, expert en aéronautique au cabinet Oliver Wyman « croit beaucoup à l’hydrogène comme moyen propulsif mais ce ne sera pas la seule condition du développement de ce nouvel avion ». Il faudra également « revoir les formes aérodynamiques » (ailes, fuselage) de l’appareil, l’hydrogène nécessitant des espaces de stockage quatre fois à six fois supérieurs aux réservoirs de kérosène.
- Quels autres moyens?
Une meilleure coordination du trafic aérien et l’optimisation des trajectoires d’appareils mieux connectés entre eux et avec le contrôle aérien au sol peut permettre des gains en carburant et en émissions de CO2 de 10% dès 2023, assure le groupe de technologies Thales, qui planche sur ces sujets.
Au sol, un moteur électrique fixé au niveau du train d’atterrissage, pour que l’avion roule sans avoir recours aux réacteurs et donc économise du carburant, a été mis au point par Safran, mais pas adopté pour l’heure par les avionneurs.
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Pour Michael Gill, directeur environnement de l’Iata, « les avions zéro-émission finiront par arriver, mais si on est réaliste, ce sera dans la seconde moitié de ce siècle que nous les verrons vraiment décoller ».
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