Arrêt du grand conseil du roi du 28 septembre 1618
Après plus de 10 ans d’une bataille juridique qui opposait les consuls, représentants des habitants de Gourdon au seigneur Pons de Lauzières-Thémines, le 28 septembre 1618 le conseil du roi a enfin tranché ! Un petit rappel des faits s’impose :
Vers 1606, le seigneur de Thémines entreprend des travaux pour restaurer et étendre le château de Gourdon. Il rencontre à cette occasion une vive opposition tant de la part des habitants que des autres coseigneurs de Gourdon. Il règle ses différends avec ces derniers en rachetant leurs parts de la seigneurie, mais les consuls, de leur côté, continuent de s’opposer à lui.
L’affaire vient finalement d’être étudiée par le conseil du roi au cours de cette année 1618, donnant ainsi l’occasion à chaque partie de présenter ses arguments.
Le seigneur de Thémines, dans sa requête du 28 mai, a demandé à être reconnu « comme étant le vrai et seul seigneur ». En conséquence, il veut que ses armoiries soient mises aux portes de la ville, à l’église Saint Pierre, à l’hôtel des consuls(1) et ainsi de suite. Chaque année, les nouveaux consuls lui prêteront serment de fidélité comme le prévoit la charte des coutumes de 1244 et de son côté, il prêtera serment de les protéger. Enfin, conformément à un accord de 1383, il estime avoir droit à une part des sommes issues des amendes, impôts divers, droits de péage, etc., ainsi qu’à la totalité des biens immobiliers confisqués et aux trois quarts des biens mobiliers confisqués.
Le 19 juillet, un délégué représentant les consuls et habitants de Gourdon a comparu devant le grand conseil. En effet, ces derniers affirment détenir un huitième de la seigneurie de Gourdon. Ils demandent également à avoir la moitié de tous les biens confisqués.
Il faut savoir que la propriété d’une seigneurie et des droits associés sont très difficiles à prouver. Les parties ont fait valoir divers accords, transactions et procès ayant trait à la répartition des parts et droits des seigneurs de Gourdon sur plusieurs siècles : un accord de 1383 ; un arrêt de 1536 confirmant que l’ancêtre de Pons, Louis de Thémines, détenait bien cinq huitièmes de la seigneurie ; un arrêt de 1539 annulant certains éléments de la décision intervenue 3 ans plus tôt mais confirmant les parts du seigneur de Thémines ; le don par Guyon de Clermont de sa part dans la seigneurie de la ville aux consuls et habitants en 1606 ; le rachat par Pons de Lauzières-Thémines des parts d’Antoine de Gourdon, de Guyon de Clermont et de Louis de Gourdon de Genouillac en 1608 et 1610, et ainsi de suite.
Le cœur du problème semble venir de la part de Guyon de Clermont : selon les consuls, il leur avait donnée en 1606, tandis que selon le seigneur de Thémines, il la lui aurait vendue en 1608…
Finalement, le 28 septembre 1618 après avoir étudié toutes ces pièces, « le conseil a maintenu et gardé, maintient et garde le dit messire Pons de Thémines en la possession et jouissance de se dire et porter seul seigneur baron, haut justicier de la dite terre et baronnie de Gourdon et l’a maintenu en tous ses droits honorifiques appartenant au seigneur baron, haut justicier. Pourra le dit de Thémines, faire mettre ses armoiries aux portes de la ville, en la maison commune, au banc des consuls en l’église et autres lieux publics de la dite ville et baronnie de Gourdon, au dessus des armoiries de la dite ville ».
Le jugement détaille également diverses décisions concernant le paiement des impôts, péages et rentes au seigneur, entérinant les demandes du seigneur de Thémines. De plus, tous les propriétaires, à l’exception de ceux qui tiennent leurs terres en franc-alleu(2) doivent lui rendre hommage, lui payer l’impôt lors des successions et l’informer des ventes afin qu’il puisse éventuellement exercer son droit de préemption, conformément à la charte des coutumes de Gourdon. Enfin, les consuls et habitants de la ville doivent payer les frais de la procédure judiciaire.
Ce procès confirme donc tous les droits revendiqués par le seigneur de Thémines et laisse peu d’espoir aux Gourdonnais qui jusqu’à présent s’y opposaient.
Les mois à venir seront décisifs pour l’avenir du château de Gourdon, nous ne manquerons pas de vous tenir informés.
Cet article a été rédigé par les élèves du cours de paléographie (particulièrement Guillaume Verdier, Eric Cadoul et Delphine Soubiroux-Magrez) dirigé par Max AUSSEL, tous membres de l’assocation Héritages du Sénéchal.
Référence : registres du grand conseil du roi, Bibliothèque nationale, Ms. Français 15.535, folios 137 à 146, transcription de Max Aussel.
(1) actuelle mairie
(2) À l’époque féodale, Terre de pleine propriété, affranchie de toute obligation ou redevance (opposé à fief).
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