Le déficit en eau pèse sur le sud-ouest

À quelques encablures des rives du Célé, dans la salle Balène de Figeac, l’agence de l’eau Adour-Garonne organisait hier son forum local de l’eau pour le bassin du Lot. En présence notamment du préfet, Jérôme Filippini et du président du comité de bassin, Martin Malvy, les principaux acteurs de l’eau dans le bassin du Lot étaient réunis pour évoquer le bilan des actions en 2018 et surtout prendre connaissance des dispositions du onzième programme de l’agence dont la mise en application est prévue jusqu’en 2024.

 Sur le précédent programme (2013-2018), ce sont 92 millions d’euros d’aides de l’agence qui ont été alloués à diverses opérations répondant aux appels à projets, dont 18 millions d’euros pour l’année 2018. Le nouveau programme sur cinq années est avant tout marqué par la mise en œuvre d’un grand plan d’adaptation au changement climatique (PACC), urgence incontestable de l’époque. Ce PACC prévoit un très large éventail de mesures ayant pour principal objectif de répondre au risque de déficit en eau qui pèse sur le sud-ouest. Un déficit qui pourrait atteindre 50 % des prélèvements actuels en 2050, selon les estimations. «Nous sommes dans la réalité, pas dans un film d’animation», martèle Martin Malvy en précisant que si rien n’est fait, «il n’y aura bientôt plus d’eau au robinet !». Une vision partagée par Jérôme Filippini qui explique toutefois «qu’il est encore temps d’agir tous ensemble» pour limiter les effets du réchauffement climatique sur l’eau, «le carburant de toutes les économies». Une urgence qu’il va falloir concilier avec l’impératif de maîtrise des coûts dans un contexte de baisse générale des crédits de l’État.
 Maxime Trédan La Dépêche

Impact du changement climatique sur les ressources en eau souterraine

Le bassin Adour-Garonne bénéficie d’un climat tempéré à dominante océanique, doux et humide. Mais depuis plus d’un siècle, la température augmente et les précipitations subissent des modifications. Ces changements climatiques vont engendrer des perturbations au sein du cycle de l’eau et donc, au niveau de la ressource en eau souterraine. Des conséquences directes et indirectes sont à prévoir, même si, aujourd’hui, il est encore difficile de prévoir l’évolution exacte du climat.

Les projections climatiques via la modélisation

Depuis plus d’un siècle, une hausse des températures a pu être observée. L’évolution des précipitations, elle, ne montre pas de tendance généralisée sur le territoire mais plutôt une évolution hétérogène.
Pour étudier les impacts de ces changements climatiques sur la ressource en eau souterraine, des travaux de modélisation sont menés sur le bassin Adour-Garonne. Différentes projections climatiques sont couplées à des modèles numériques afin de prévoir les futurs scénarios concernant l’évolution du climat et de la ressource souterraine. Ainsi ces outils permettent de simuler non seulement le fonctionnement actuel de certains systèmes hydrogéologiques mais aussi leur fonctionnement futur.

L’impact direct sur la ressource en eau souterraine

De nombreuses masses d’eau sont répertoriées dans le bassin Adour-Garonne : 2 913 au total. 105 d’entre elles représentent des masses d’eau souterraines. Sur les 105 masses d’eau souterraines, 85 sont des nappes libres et 20 sont des nappes captives. Actuellement, on recense 6 nappes souterraines en déséquilibre.

Etat quantitatif des masses d’eau souterraine du bassin Adour-Garonne
Equilibre Déséquilibre Doute
70 6 29

D’après les études menées, les changements climatiques auront des répercussions directes sur les ressources en eau souterraine, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif.

Modification des flux entrants et des flux sortants

La recharge en eau des nappes souterraines, et plus particulièrement des nappes libres, se fait grâce à l’infiltration de l’eau de pluie. Cette recharge dépend donc des précipitations. Les différentes études menées sur les changements climatiques montrent, en règle générale, une diminution des précipitations, notamment pour la période estivale. A cela s’ajouterait une augmentation de l’évapotranspiration, ce qui diminuerait encore l’eau réellement infiltrée.
La diminution du flux entrant dans le système changerait les conditions de recharge des systèmes hydrogéologiques.

En ce qui concerne les flux sortants, il existe une étroite relation entre les cours d’eau et les aquifères souterrains. Généralement, les cours d’eau alimentent les nappes en hiver et sont alimentés par ces dernières en été.
Si les cours d’eau sont amenés à connaître des périodes d’étiage plus importantes, alors les nappes joueraient un rôle plus important en matière d’alimentation des cours d’eau. Le volume d’eau sortant des nappes serait alors plus important et étalé sur une plus grande période.

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Modification de l’interaction nappes/cours d’eau

En période hivernale ou de hautes eaux, ce sont les cours d’eau qui alimentent les nappes. Ainsi, une baisse des débits des cours d’eau engendrerait une plus faible recharge des eaux souterraines en hiver.

Un impact indirect dû à la pression de l’homme sur son environnement

Le changement climatique va induire également des impacts indirects sur la ressource en eau souterraine avec par exemple :

  • une augmentation des volumes prélevés pour la consommation domestique, particulièrement pendant les périodes de sécheresse qui pourraient être de plus en plus fréquentes dans le futur ;
  • une augmentation des prélèvements pour l’irrigation, car plus il fait chaud, plus les plantes ont besoin d’eau ;
  • une augmentation des prélèvements d’eau souterraine induite par la diminution des ressources disponibles en surface.

Ainsi, les questionnements portent à la fois sur le court terme avec la gestion des périodes de demandes sévères et ponctuelles comme la période d’irrigation, mais également sur le long terme avec l’effet cumulé d’un déficit de recharge ou d’alimentation, associé à une forte augmentation des prélèvements.

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