Le vice-président du Département en charge des infrastructures de mobilité fait le point

Frédéric Gineste, vice-président du Département du Lot, en charge des infrastructures de mobilité, fait le point sur les dossiers en cours et à venir. Entretien.

> Medialot : la mobilité est-elle au centre du projet du Département ?

Frédéric Gineste : pour les élus du Département, les questions de mobilité et leur déploiement constituent un enjeu majeur pour l’avenir de notre département et son désenclavement, tant pour répondre à des problématiques économiques, environnementales ou d’organisation territoriale. Que l’on parle de Voie verte, de mobilité douce, de voirie, de liaisons aériennes, de navigation ou de train, le Département est, et sera, dans une logique ambitieuse et innovante durant ce prochain mandat.

> M. : la future construction de la LGV Bordeaux – Toulouse devrait être bénéfique à l’ensemble du réseau ferroviaire régional ?

F.G. : tous les élus départementaux sont convaincus que demain l’accroissement de l’usage du train sera porté par cette construction. En ce qui concerne la ligne ferroviaire POLT (Paris-Orléans-Limoges-Toulouse), je suis convaincu qu’en participant au financement du Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) et la construction de la ligne TGV Bordeaux – Toulouse, nous permettrons simultanément l’amélioration de l’ensemble du réseau ferroviaire de toute l’Occitanie. Les élus du département vont ainsi accompagner cet engagement financier conséquent (GPSO) par une demande de modernisation de la ligne POLT en termes de gain de vitesse mais aussi en nombre de liaisons, de dessertes TER. Ainsi, il est essentiel d’augmenter la vitesse de Toulouse à Limoges.

> M. : Êtes-vous optimiste quant à l’avenir du rail ?

F.G. : selon moi, nous sommes sur une dynamique très encourageante et nous espérons que cette modernisation du sud de la ligne POLT soit inscrite à l’ordre du jour des instances délibératives sur le sujet. Cette très bonne nouvelle vient s’ajouter à l’arrivée sur la ligne POLT de 16 nouvelles rames en 2023 et aux 1,6 milliard d’euros de travaux déjà engagés par l’Etat pour la régénération de la ligne POLT.

Medialot

LGV Bordeaux-Toulouse : 5 questions clés sur cette ligne à grande vitesse

Attendue depuis de très nombreuses années, la ligne LGV Bordeaux-Toulouse, qui doit permettre de relier la Ville rose à Paris en un peu plus de 3 heures, commence à voir le bout du tunnel. Tour d’horizon en cinq points.

Que change la nomination du préfet d’Occitanie à la tête du projet ?

Le 3 septembre dernier, le Premier ministre Jean Castex a signé une lettre de mission à Étienne Guyot, préfet de la région Occitanie et de Haute-Garonne, pour le charger de coordonner le projet LGV Sud-Ouest et assurer sa mise en œuvre. « C’est une avancée majeure sur laquelle nous étions d’accord avec Jean-Luc Moudenc, le maire de Toulouse. Le préfet est un spécialiste des montages complexes et des dispositifs fiscaux dont le projet aura besoin. Le centre de décision sera à Toulouse pour construire la ligne Toulouse – Bordeaux et non pas l’inverse… » se félicite Carole Delga à la tête de la région Occitanie. Étienne Guyot est en effet un excellent connaisseur de la conduite des grands projets. Il a présidé la Société du Grand Paris de 2011 à 2014 contribuant ainsi au succès du plus grand chantier de France : le Grand Paris Express. Il avait travaillé sur ce projet dès 2009 en tant que directeur de cabinet de Michel Mercier, alors ministre de l’Aménagement du territoire et du développement de la Région capitale. « Il sera le représentant de l’Etat sur le terrain et aura autorité sur toutes les administrations en lien direct avec le Premier ministre. Un gage d’efficacité » analyse quant à lui Jean-Luc Moudenc, le président de Toulouse Métropole.

Quelles sont les prochaines étapes ?

La première mission du préfet coordinateur sera de rédiger les statuts de la future société de financement et/ou de projet qui sera le bras armé opérationnel de la LGV Bordeaux – Toulouse. Cette société sera chargée de recevoir les subventions de l’Etat, des collectivités, de l’Europe mais aussi des recettes fiscales. Elle pourrait aussi devenir le futur maître d’ouvrage du chantier ce qui éviterait la dispersion des forces. Une fois rédigés, ces statuts seront soumis au conseil d’Etat avant que le gouvernement ne signe une ordonnance portant création de la société au plus tard en avril 2022.

Qui va payer quoi ?

Cette société doit s’attacher à boucler le financement de la ligne dont le coût est estimé à 8,8 milliards d’euros. L’État s’engage sur 4,1 milliards d’euros et demande la même contribution aux collectivités. Les crédits européens seront mobilisés pour finaliser le tour de table. Carole Delga et Jean-Luc Moudenc ont écrit voilà quelques jours à toutes les collectivités concernées d’Occitanie et de Nouvelle Aquitaine. Les directeurs généraux des services de ces collectivités évaluent actuellement quelle pourrait être leur contribution respective. « L’objectif serait de tous se réunir d’ici octobre. C’est vrai que l’on demande aux collectivités de s’engager mais l’échelle de temps s’étire sur quarante ans » tempère Carole Delga. Et Jean-Luc Moudenc de résumer la situation : « C’est à nous tous de réussir à lever 4,1 milliards pour entrer dans l’histoire ! ».

À grande maille, sur les 4,1 milliards portés par les collectivités, celles d’Occitanie apporteront 55 % contre 45 % pour celles de Nouvelle Aquitaine. Par typologie de collectivités, les régions assureront 40 %, les métropoles de Toulouse et Bordeaux 20 %, les départements et les agglomérations concernés* 40 %. Mais pour soulager la part des collectivités, des ressources nouvelles sont à l’étude (lire dernière question).

Le calendrier peut-il être tenu ?

Pour Jean-Luc Moudenc le calendrier est « serré et exigeant mais c’est la seule façon pour le finaliser. Et de poursuivre : Quand un dossier traîne comme celui-ci depuis trente ans c’est une incitation à l’inertie ». Selon le maire de Toulouse, si le projet est juridiquement et financièrement prêt, les délais seront tenus car le tracé est définitif, la déclaration d’utilité publique obtenue, les gares connues… Il restera à préparer le chantier et sélectionner les entreprises en 2023 pour un début des travaux en 2024. L’entrée en service est évoquée pour 2030.

Y aura-t-il une taxe spéciale LGV ?

C’est clairement une hypothèse de travail. « Avec Carole Delga, nous avons plaidé depuis juillet 2017 pour que cette société porteuse puisse bénéficier d’une fiscalité dérogatoire comme c’est le cas pour le Grand Paris avec des recettes nouvelles » rappelle Jean-Luc Moudenc. L’idée est de lever des taxes sur les bureaux selon un corridor et une temporalité à déterminer et/ou sur les poids lourds, voire de bénéficier de la part régionale de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) que se partagent les régions. Nouvellement élue présidente des régions de France, Carole Delga aura un rôle déterminant sur cette question. Le produit de toutes ces nouvelles taxes viendra en déduction de la contribution des collectivités qui toucheront donc, a posteriori un « bonus ».*

  Gil Bousquet ladepeche.fr