Mutualité Française : les enjeux de la petite enfance
“Petite enfance : quels défis pour nos territoires ?” : c’est le thème de la matinée-débat “Voix de la santé” organisée le 5 juin par la Mutualité Française, dans les locaux de la Dépêche du Midi, à Toulouse. Des échanges nourris qui ont permis de dégager des pistes de réflexion pour accompagner au mieux les jeunes parents et leurs enfants.
Reste cependant une problématique : celle de l’inégalité, voire de la fracture territoriale. Faire garder son enfant en bas âge – que ce soit au sein de structures collectives comme des crèches ou par des assistants maternels – n’est en effet pas aussi simple en ville que dans les territoires ruraux. Un avis partagé par Dominique Joseph, secrétaire générale de la Mutualité française. “La question du financement des infrastructures, et notamment des crèches, est évidemment au coeur des enjeux, constate-t-elle. Car nous le savons, un euro investi dans la petite enfance, ce sont trois euros économisés dans la lutte contre l’échec scolaire. Ce dont nous souffrons le plus, en la matière, c’est d’un certain cloisonnement des politiques, notamment entre celles de la petite enfance et celle de l’enseignement.”
S’adapter aux différents publics
Dans tous les cas, selon les professionnels, c’est une vision transverse qui doit être adoptée, ainsi qu’une certaine forme d’adaptation des politiques en fonction des publics concernés. “Le choix du mode de garde est libre, bien entendu, se réjouit Jean-Charles Piteau. Mais nous constatons que l’accueil collectif favorise le développement de l’enfant, ce qui est particulièrement important dans le cas de familles fragiles ou précaires.” Sans vanter le “100 % crèche” partout et pour tous, la logique déployée par les professionnels se veut résolument pragmatique. “Les crèches doivent être prioritaires dans certains cas, et pas dans d’autres. Nous devons cibler nos actions en fonction des territoires et des publics”, estime le directeur de la Caf de la Haute-Garonne. De son côté, Laurence Katzenmayer, adjointe au maire de Toulouse en charge de la petite enfance, rappelle les enjeux toulousains. “Nous avons dans notre ville 20 000 enfants de moins de trois ans. 18 bébés naissent chaque jour. Nous enregistrons la deuxième croissance démographique française derrière Paris. Mais nous n’avons pas les moyens de Paris ! Notre volonté politique est d’accompagner ces enjeux, en créant 1 000 nouvelles places de crèches au cours du mandat. 900 l’auront été en fin d’année. Au total, nous investissons près de 75 millions d’euros chaque année sur ces questions.” Mais comme les autres intervenants du débat, l’élue insiste sur la diversité des situations familiales rencontrées. “Les besoins sont différents d’une famille à l’autre et d’un quartier à l’autre, analyse-t-elle. Nous devons donc nous adapter.” Pour Jean-Charles Piteau, le nerf de la guerre, comme souvent, reste le financement. “Peu de gens le savent, mais une place en crèche, cela coûte 15 000 euros par an et par enfant, indique-t-il. C’est très important !” Des choix politiques doivent par conséquent être opérés, reconnaît Dominique Joseph. “Mais les enjeux sont majeurs, estime-t-elle. Il n’est pas tolérable que certaines personnes – principalement des femmes – soient obligées de renoncer à travailler parce qu’elles ne trouvent pas de mode de garde pour leurs enfants.”
Crèche : des critères opaques ?
Reste à composer avec une idée répandue, notamment chez les jeunes parents : celle qu’il existerait une certaine opacité dans les modalités d’attribution des places en crèche, qui pourrait générer du favoritisme. Des accusations que Jean-Charles Piteau balaie du revers de la main. “Il faut savoir que les collectivités n’ont aucune obligation de rendre publiques les modalités d’attribution mises en oeuvre. Cette transparente est souhaitable, bien sûr. Mais dans notre territoire, beaucoup de choses ont déjà été faites dans ce sens.” A Toulouse, par exemple, “il n’y a aucune opacité, soutient Laurence Katzenmayer. Nous enregistrons 500 à 600 demandes par mois et ce sont des commissions qui statuent, en fonction des places disponibles et des besoins exprimés. Nous privilégions les familles qui travaillent, puis celles qui sont en formation ou à la recherche d’emplois. Dans tous les cas, nous mettons l’humain au coeur de nos choix.”
“Eviter la logique du pire”
Et le rôle de l’Etat, dans tout ça ? Guillaume Chiche, député La République en marche de la première circonscription des Deux-Sèvres et co-rapporteur d’une mission d’information parlementaire consacrée, justement, à la politique familiale, rappelle que 3 % du PIB est injecté chaque année sur ces sujets. “Nous sommes face à des enjeux très importants, analyse-t-il. Notre taux de natalité baisse. L’équilibre entre vie familiale et vie professionnelle n’est pas encore une réalité. Une femme sur deux, après son premier enfant, passe à temps partiel ou arrête de travailler. On ne peut pas se contenter de cette situation.”
Pour le député de la majorité, il convient de rompre avec la logique de “fracture territoriale”, tout en s’adaptant aux réalités vécues par les jeunes parents. “Une famille où seul l’un des deux parents travaille n’a bien souvent pas de solution de garde. Donc cette personne s’occupe des enfants et ne peut pas rechercher d’emploi. C’est la logique du pire. Nous devons réinventer les modes de financement des structures de garde collective, en partant des besoins enregistrés sur le terrain.” Mais attention, prévient le député, à ne pas oublier les autres modes de garde. “Nous devons conserver la diversité des solutions d’accueil, estime-t-il. Tout ne passera pas par la crèche. Les assistantes maternelles jouent elles aussi un rôle majeur.”
La Mutualité Française en Occitanie
En Occitanie, la Mutualité Française représente 179 mutuelles, qui protègent 3,2 millions de personnes, soit 52 % de la population. Cela représente 1,8 milliard d’euros de cotisations réinvesties dans l’économie de la santé du territoire.
Les prochains débats “Voix de la santé”
Le 2 octobre à Montpellier : “Le rôle des perturbateurs endocriniens” ; le 6 novembre à Toulouse: “Intelligence artificielle et santé” ; le 14 décembre à Montpellier : “Les mutuelles de demain”.
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