La LGV: Enclavement du Lot? Position de Serge Rigal. Revalorisation salariale des aides à domicile

Le 15 novembre prochain, deux délibérations seront notamment au menu de l’assemblée départementale : l’engagement ferroviaire du Département, et la revalorisation salariale des aides à domicile.

L’occasion pour Serge Rigal, le président du Département du Lot, de mettre les points sur les i notamment sur le dossier de la Ligne Grande Vitesse Bordeaux-Toulouse. « L’engagement ferroviaire du Département du Lot ne peut être remis en question. Les voies de train, TER, POLT et TGV, entre Toulouse et Montauban sont actuellement saturées et grâce à ces nouvelles offres ferroviaires , Toulouse-Castelnau d’Estrétefonds, et la LGV Bordeaux-Toulouse, on va « désengorger » la ligne avec des TER doublés : 10 allers-retours pour Cahors, et 5 allers-retours pour Gourdon et Souillac. Je m’oppose à l’idée du train contre train. La LGV n’est pas une anti POLT. Elle va la renforcer et, j’ose espérer, permettre le retour du fret sur Toulouse – Paris. La LGV nous rapprochera également à terme du sud de la France et de l’Espagne. Au niveau financier rien n’est figé. Certains élus ne veulent pas faire jouer la solidarité alors que leurs territoires en ont bénéficié à une époque.. Je rappelle que si nous étions restés figés sur le credo « c’est à l’Etat de payer » sur le dossier du Très Haut Débit, où en serions nous aujourd’hui» a-t-il ainsi expliqué avant de conclure sur le dossier de l’aide à domicile : « Le gouvernement a débloqué une enveloppe de 200 millions d’euros pour une revalorisation salariale de 15 % des aides à domicile sauf que le gouvernement proposait d’exclure certaines structures comme Lot Aide à Domicile par exemple alors que le secteur avait été également oublié par le Ségur. Je m’oppose à cette exclusion et je proposerai ainsi aux élus d’aider toutes les structures, publiques et privées, du département en votant une dotation annuelle de 2 400 000 euros avec un apport de l’Etat de moins de 1 million d’euros. Je pense qu’il n’y a pas beaucoup de Départements en France qui vont proposer cette aide. Notre action, nous allons la conforter : nous avons notamment été retenus pour un appel à projets sur les métiers du grand âge. L’aide à domicile dans le Lot, c’est la plus grande entreprise du département et demain ce sera le 1er recruteur, il faut donc anticiper sur la revalorisation salariale et la formation. » Les messages sont passés.

Medialot

Hautes tensions politiques autour du projet de ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse

Le maire écologiste de Bordeaux, Pierre Hurmic, s’oppose au chantier défendu par le gouvernement et les régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie.

Par Claire Mayer(Bordeaux, correspondante)Publié hier à 17h15, mis à jour à 09h37 

Le 2 juillet 2017, Bordeaux inaugurait en grande pompe sa nouvelle ligne à grande vitesse (LGV). L’objectif, placer la capitale girondine à deux heures et quatre minutes de Paris contre trois heures quatorze auparavant. Un projet très attendu par son maire d’alors, Alain Juppé, et imaginé, en 1992, pour un coût total de 7,8 milliards d’euros. Un tremplin qui a permis à Bordeaux de mettre en exergue sa fameuse qualité de vie et d’assurer une compétitivité espérée.

Ce projet de LGV n’est pourtant pas le seul. En septembre, le Conseil d’Etat a validé une nouvelle ligne à grande vitesse portée par le Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) entre Bordeaux et Toulouse cette fois, jusqu’à Dax (Landes). Si Emmanuel Macron avait annoncé, en 2017, qu’il ne souhaitait plus financer ces grandes lignes mais favoriser les « trajets du quotidien », celui de cette nouvelle ligne a été relancé par Jean Castex lors de sa nomination à Matignon.

Le montant du nouveau chantier s’élèverait à 14 milliards d’euros, dont 4 milliards financés par l’Etat, 40 % par les collectivités locales – la Nouvelle-Aquitaine et l’Occitanie – et 20 % par des fonds européens. Cette ligne placerait Toulouse à environ trois heures et dix minutes de Paris, contre quatre heures dix actuellement.

Si Carole Delga, présidente (PS) de la région Occitanie, et Alain Rousset, président (PS) de la Nouvelle-Aquitaine, soutiennent le projet, d’autres élus s’y opposent. Notamment ceux du Lot-et-Garonne, qui ont refusé en bloc de participer à son financement.

Bordeaux Métropole doit débattre du sujet lors de son prochain conseil, le 26 novembre. Le maire écologiste de Bordeaux, Pierre Hurmic, également vice-président de la métropole, a lancé l’offensive contre la réalisation de cette nouvelle ligne ferroviaire. Début novembre, il a lancé un site Internet, Alternative LGV, listant un certain nombre de propositions pour contrer celle de la ligne à grande vitesse. Le site compte déjà 2 700 signataires, dont la maire (Europe Ecologie-Les Verts) de Poitiers, Léonore Moncond’Huy, le président de l’association de défense de l’environnement Sepanso Aquitaine, Daniel Delestre, mais aussi des économistes, agriculteurs, viticulteurs, maraîchers…

« Vision égoïste » de l’aménagement du territoire

A Bordeaux, le sujet s’est rapidement imposé dans le débat politique local. En créant ce site, Pierre Hurmic souhaite « fédérer toutes les oppositions à ce projet inutile ». Une prise de position qui a immédiatement suscité des réactions. A commencer par le président des députés La République en marche (LRM) à l’Assemblée nationale, Christophe Castaner, qui a dit, sur France Bleu Gironde, le 29 octobre, être « choqué » par la réaction de Pierre Hurmic. « Au fond, il se comporte comme un enfant qui a déjà son jouet, le TGV qui vient à Bordeaux, et qui juge que pour Toulouse et pour l’accès à l’Espagne, ce n’est pas intéressant », a déclaré M. Castaner.

Début novembre, le ministre des transports, Jean-Baptiste Djebbari, a renchéri sur Europe 1 : « Je constate que, comme d’autres maires écologistes, [Pierre Hurmic] n’aime pas le Tour de France, il n’aime pas les sapins de Noël, il n’aime pas le TGV. » « Je suis sidéré par la médiocrité et le niveau bas, répond Pierre Hurmic. On attend d’un ministre des transports non pas qu’il polémique, mais qu’il nous explique pourquoi ce dossier du TGV ressort maintenant. Mon point de vue n’est pas polémique, il est politique. Il dit que je n’aime pas les symboles, c’est ça le débat ? Ça devrait plutôt être la politique d’aménagement du territoire de ce gouvernement. »

Le maire de Bordeaux dénonce par ailleurs le fait qu’au sud de Bordeaux, 4 830 hectares de sites Natura 2000 en zone naturelle agricole viticole vont être artificialisés, dont 2 870 hectares de forêts. Cette décision de l’Etat intervient en plein COP26, qui « consistait à réclamer la fin de la déforestation, la sobriété foncière et la protection de la biodiversité », souligne M. Hurmic.

L’écologiste dénonceune « vision de l’aménagement du territoire qu’ [il]n’hésite pas à qualifier d’égoïste » et veut « arrêter cette arrogance qui consiste à faire venir toutes les activités économiques sur les métropoles au détriment des territoires traversés », rappelant l’importance des « gilets jaunes » dans sa région, qui condamnent la toute-puissance de Bordeaux sur ses territoires alentours.

Région « la plus enclavée de France »

Mais pour Alain Rousset, l’arrivée de la LGV à Bordeaux a justement fait « bondir le trafic des TER » et la nouvelle ligne prévoit une hausse de 12 % de leur trafic pour répondre aux besoins des correspondances. La LGV offrirait aussi un bilan carbone favorable, puisque selon la région, un TGV rempli à 80 % permettrait d’éviter 370 trajets en voiture. Pour le président de la Nouvelle-Aquitaine, cette nouvelle ligne améliorerait également le fret ferroviaire : si 10 000 camions circulent chaque jour sur l’axe Bordeaux-Espagne, la création de la LGV vers l’Espagne permettrait de dégager de la capacité pour passer la part du fret ferroviaire de 3 % à 18 %. Pour M. Rousset, la position de M. Hurmic relancerait également le projet controversé du grand contournement routier de Bordeaux.

Carole Delga, quant à elle, s’insurge contre « la virulence des propos de Pierre Hurmic et la démagogie de ses arguments ». La présidente de l’Occitanie rappelle que la région est « la plus enclavée de France » et qu’ellea financé à hauteur de 300 millions d’euros la ligne LGV Paris-Bordeaux. « Je ne vois pas pourquoi tous les Françaises et Français ont accès à la grande vitesse, à une connexion avec Paris, avec l’international, et pourquoi nous, parce qu’on est au fin fond de la France, on n’y aurait pas droit », explique Mme Delga. Pour la dirigeante socialiste, cette nouvelle ligne ferroviaire permettrait de proposer davantage de « trains du quotidien et donc de créer le RER du nord toulousain ». « Ma détermination est bien supérieure à celle de Pierre Hurmic. (…) Je me battrai comme une lionne sur ce sujet », prévient-elle.Lire aussi  Premier bilan carbone d’une ligne à grande vitesse

Professeur à Sciences Po Bordeaux, Gilles Pinson fait partie des signataires d’Alternative LGV. Selon ce chercheur enseignant en science politique urbaine, un certain nombre d’investissements, comme les grandes connexions Paris-Marseille ou Paris-Bordeaux, ont eu du sens et ont permis de relancer le ferroviaire à une époque où il pouvait « souffrir d’une concurrence avec la voiture et l’avion ». Mais aujourd’hui, poursuit-il, « développer des nouveaux sillons pour le ferroviaire, ça implique des conséquences en termes écologiques, qui génèrent un certain nombre de bouleversements. Est-ce que le gain de temps en vaut la chandelle ? Quand on met en rapport le coût à la fois écologique et financier alors que des alternatives existent, ça me paraît un peu ahurissant ».

Surtout, M. Pinson pointe le calendrier choisi par le gouvernement pour relancer le projet à quelques mois de l’élection présidentielle, y voyant un moyen pour le pouvoir macroniste « d’enfoncer un coin entre les socialistes et les Verts ». « L’opération est réussie quand on voit le degré d’hystérisation qu’a atteint le débat très rapidement », ajoute-t-il.

Claire Mayer(Bordeaux, correspondante)

Le Monde daté du 12/11/2021