Quel est l’avenir des OGM cachés?

ogmLe Conseil d’Etat français a levé l’interdiction de cultiver la variété de maïs OGM MON810 de Monsanto mais s’est exprimé sur une directive obsolète… Le vrai problème ce sont les OGM cachés.

De nouvelles techniques dans le domaine de la biotechnologie ont fait leur apparition. Ce sont les NPBT, pour « New Plant Breeding Techniques », qui permettent aujourd’hui aux scientifiques de modifier le génome des plantes selon des techniques un peu différentes que celles utilisées pour les OGM. Pour l’instant, les NPBT ne sont pas considérés comme des OGM à proprement parler, et ne tombent donc pas sous le coup de la directive européenne qui en régule la commercialisation et oblige les industriels à étiqueter les aliments contenant plus de 0,9 % d’OGM.

Au regret de huit associations membres du Haut Conseil des biotechnologies (HCB) telles que Greenpeace, France Nature Environnement ou la Confédération paysanne, qui les ont surnommés les « OGM cachés » lors d’une manifestation devant l’école AgroParisTech de Paris le 6 avril.

Quelle différence entre OGM et NPBT ?

Un OGM et un NPBT sont effectivement, tous deux des organismes vivants dont le patrimoine génétique a été modifié par une intervention humaine. Sauf que, un OGM « classique » est le produit d’un procédé très spécifique : la transgénèse.

Cette technique consiste à isoler un gène issu d’un organisme A et à l’introduire dans le génome d’un organisme B. Par exemple, les maïs BT commercialisés par le semencier américain Monsanto, sont des variétés de maïs dans lesquelles on a inséré le gène d’une bactérie (Bacillus thuringiensis) qui permet la fabrication d’une protéine insecticide. Un organisme « transgénique » désigne donc une plante ou un insecte qui contient dans son génome un ou plusieurs gènes étrangers, c’est à dire provenant d’une autre espèce.

En revanche, le NPBT est le produit d’un procédé dit de « mutagenèse ». Il s’agit là de modifier le génome sans recours à un organisme étranger, en provoquant une mutation ciblée au sein même du génome d’une plante. En soumettant un gêne à des radiations, des substances chimiques ou en réintroduisant une séquence synthétisée d’ADN, les chercheurs en biotechnologie obtiennent une plante mutante, qui correspond aux propriétés recherchées (résistance aux parasites, meilleur rendement, etc.).

 

Positions divergentes des anti-OGM et des industriels

Si les NPBT sont effectivement des organismes génétiquement modifiés, les industriels de la biotechnologies estiment que dans la mesure où ils ne font qu’accélérer un processus de mutation qui se produirait également dans la nature, il n’y a pas de différence, au final, entre les mutants naturels et artificiels.

Le GNIS, Groupement interprofessionnel des semences et des plans, plaide pour que la règlementation des NPBT ne se fasse pas sur la base des « techniques mais des plantes obtenues ». Pour les semenciers, les avancées scientifiques en matière de modification du génome des plantes sont une manière de faire face aux défis agricoles tout en restant leader sur le marché mondial de la semence, la France étant le premier exportateur mondial.

Si les NPBT seront considérés par la Commission européenne comme des OGM, ils seront soumis aux batteries de tests supplémentaires obligatoires pour tout produit OGM : « cela pénaliserait les 73 petites et moyennes entreprises qui travaillent sur la création de nouvelles variétés de plantes en France, et entraverait sérieusement la recherche », déclare Delphine Guey du GNIS.

Du côté des associations anti-OGM, c’est bien le principe même de modification du génome qui pose problème. « Si on n’évalue pas les effets non intentionnels des modifications génétiques de la plante sur l’environnement et la santé, comme la directive OGM le prévoit, on expose la biodiversité à des risques imprévisibles », déclare Guy Kastler, de la Confédération paysanne.

Selon les associations anti-OGM, « le gouvernement français est influencé par les lobbies industriels  » et s’appuie sur une note du Haut Conseil des biotechnologies (HCB) rédigée par des scientifiques proches des intérêts de la biotechnologie qui n’aurait pas pris en compte les avis divergents, notamment celui d’Yves Bertheau, directeur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), qui a depuis démissionné du Conseil scientifique du HCB.

Le débat, au-delà d’être scientifique et juridique, est un enjeu de société. Le modèle agricole de demain est une question de choix politique : celui de celui de l’agriculture intensive ou de l’agriculture traditionnelle et biologique. La Commission européenne devrait émettre un avis dans les prochaines semaines, pour dire si, oui ou non, les NPBT et la mutagenèse doivent être soumis à la réglementation des OGM.

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