Renforcer l’Observatoire scientifique sur la méthanisation
Il s’agit de mesurer l’incidence possible des épandages de digestat sur les abeilles, la microfaune du sol, la qualité des eaux souterraines et celle de l’air (les odeurs)…
Le 22 janvier 2021 a été lancée, en visioconférence, la mise en place de l’Observatoire Scientifique Participatif (OSP) sur la méthanisation et sur son corollaire, les épandages de digestat. Les thèmes des six ateliers de cet OSP ont été détaillés dans la Vie Quercynoise du 28 janvier 2021 : d’une part l’incidence possible des épandages de digestat sur les abeilles, la microfaune du sol, la qualité des eaux souterraines et celle de l’air (les odeurs), d’autre part le digestat, sa réelle valeur agronomique et ses modes de percolation dans le karst.
Il serait étonnant que ces ateliers concluent sur un satisfecit général concernant les différents problèmes abordés, sachant que, dans plusieurs conférences et interviews sur la méthanisation, des scientifiques de renommée internationale ont émis des critiques étayées sur plusieurs de ces points. Qui justifient cet OSP !
« Il faudrait mille méthaniseurs de la taille de BioQuercy pour remplacer une seule tranche nucléaire de Golfech »
Malgré ces incertitudes, le Conseil Départemental du Lot, au cours de sa séance du 14 décembre dernier, dans la lignée de la doxa gouvernementale sur le sujet, a travaillé sur l’avenir de notre territoire dans le domaine de l’énergie, avec l’objectif de faire du Lot un territoire à énergie positive d’ici 2050.
La stratégie repose sur un premier levier, auquel il faudra bien finir par se résoudre, une diminution de l’énergie consommée, de 40 % par rapport à aujourd’hui, et, en second, sur une augmentation significative de la production d’énergies renouvelables (EnR) qui « reposent sans conteste sur trois énergies : le bois, le photovoltaïque et la méthanisation ».
L’éolien, très présent dans l’Aveyron voisin, semble oublié tandis que la méthanisation, une fois de plus, est mise en avant, alors que les puissances qu’elle peut fournir la mettent manifestement hors concours : il faudrait mille méthaniseurs de la taille de BioQuercy pour remplacer une seule tranche nucléaire de Golfech. Ce point est d’ailleurs implicitement reconnu dans le rapport C07RK du Conseil départemental qui propose, pour produire 1 000 GW/an sur les 2 400 GWh nécessaires au département, « par exemple d’installer 1 700 ha de panneaux photovoltaïques ou 180 méthaniseurs ». 180 !!! C’est-à-dire un méthaniseur tous les 3,5 km dans la surface agricole utile ! Sans compter les exceptions : les zones Natura 2000, le PNR, les zones Znieff de type 1, et… tous les merveilleux sites qui font le bonheur des touristes… et des Lotois.
L’Allemagne fait marche arrière sur la méthanisation
Les Allemands ont bien compris les limites de ce procédé puisque, alors qu’ils ont été, en Europe, avec entre autres le Danemark, des pionniers en matière de méthanisation, ils envisagent dans leurs projections d’avenir des révisions majeures de la gestion de cette filière (PDF accessible sur le site de l’Ofate, Office Franco-Allemand pour la Transition Énergétique).
Pour cette institution, aucun scénario d’avenir n’envisage un accroissement de la production d’énergie électrique par la méthanisation. Et le scénario de référence prévoit pour l’intervalle 2020-2035 la disparition progressive du parc de méthaniseurs industriels, par l’arrêt de la construction de nouvelles unités et par le court temps de vie de ces installations. Celles-ci ont bénéficié de la loi fédérale EEG sur les énergies renouvelables qui, par ses subventions, les rendait rentables. Ces aides sont maintenant revues en baisse drastique.
De toute manière, la puissance électrique cumulée de ces installations, 5 GW, est restée modique par rapport aux 224 GW développés dans ce pays, ces chiffres illustrent encore la modestie de l’énergie à attendre de cette technique. Il ne faudrait pas que le département du Lot s’engage dans une nouvelle « Voie d’avenir » là encore sans issue.
Pourquoi les méthaniseurs actuels sont-ils à bannir ?
Il faudrait déjà que les intrants de ces installations soient restreints à des déchets « vrais » (comme les déchets alimentaires) pour soulager décharges et incinérateurs, en attendant que des solutions du XXIe siècle comme la pyrogazéification deviennent opérationnelles. Ces méthaniseurs sont à bannir à terme pour leur amont et leur aval.
En amont, une fraction même modeste des 180 méthaniseurs envisagés demanderait un accroissement massif de l’ « énergieculture », l’utilisation de terres cultivables à la production d’intrants comme le maïs, réputé « méthanogène », au détriment de la fonction ancestrale de l’agriculture d’assurer l’alimentation humaine et animale.
En aval, des épandages multipliés accroîtraient les risques encourus par les eaux souterraines, surtout en zone karstique (voir les problèmes constatés dans la perle du tourisme lotois, le gouffre de Padirac) et accéléreraient l’appauvrissement des sols (par les pertes en carbone organique) et leur surexploitation par les cultures « industrielles ». Sans parler des dommages apportés aux trésors archéologiques et historiques du Lot.
En conclusion, nous pensons que les citoyens doivent pouvoir donner leur avis sur leur avenir dans ce pays et qu’un septième atelier consacré à son avenir énergétique devrait compléter l’OSP.
JC Brenot ActuLot
N’enterrons pas trop vite la méthanisation
En matière d’écologie, les sentences sont souvent proclamées dès le début des analyses. Travaillons, réfléchissons pour présenter un résultat nuancé et argumenté !
Quelques éléments pour alimenter la discussion :
Les odeurs et l’épandage posent question. La source vient du digestat retiré du méthaniseur dès que la production de méthane diminue. En poursuivant le processus, on peut transformer ce digestat en véritable compost quasiment pas odorant et directement assimilable par les sols.
On ne remplacera pas une centrale nucléaire avec des methaniseurs. Faut-il supprimer le nucléaire beaucoup moins meurtrier que le charbon ?
Produire localement évite de surdimensionner les réseaux d’énergie.
L’exemple allemand est éclairant : dans les grandes fermes équipés de méthaniseurs, les revenus issus du méthane sont du même ordre de grandeur que ceux issus du lait! (De quoi s’interroger sur le prix du lait payé au paysan…)
La méthanisation est aussi un moyen de valoriser certains déchets organiques et évite leur enfouissement. Pourquoi la supprimer ?
Jusqu’à quelle hauteur la subventionner si elle ne sera jamais économiquement viable …
Que le débat s’anime.