Téléphonie mobile : l’impact carbone de la 5G
La France a commencé à déployer la cinquième génération des standards de téléphonie mobile (ou 5G). Dans un récent rapport, le Haut conseil pour le climat (HCC) se penche sur l’impact environnemental de la 5G. Il propose des pistes pouvant permettre de mieux maîtriser l’empreinte carbone de cette nouvelle technologie.
Contrairement à la 3G et à la 4G, l’utilisation de la 5G ne se limite pas aux réseaux mobiles. Elle ouvre des perspectives pour le développement d’usages numériques : voiture autonome, objets connectés, télémédecine… Toutefois, l’impact de la 5G sur l’environnement n’a fait l’objet d’aucune étude préalable.
Le Haut conseil pour le climat (HCC) a ainsi publié en décembre 2020, à la demande du Sénat, un rapport sur les incidences de la 5G sur les émissions de gaz à effet de serre (GES)(nouvelle fenêtre). Il évalue ces impacts de façon prospective et formule des recommandations pour les réduire.
L’impact environnemental de la 5G
Ce nouveau standard international présente des avantages techniques : des débits accrus, un temps de latence réduit et une plus grande densité de terminaux connectables. Il permettrait d’augmenter la compétitivité des entreprises et d’équiper les zones les plus denses où les réseaux 4G arrivent à saturation. Les usages de la 5G dépendront des équipements et des services associés.
L’incidence environnementale, notamment climatique, de la 5G n’a été que récemment prise en compte, contrairement aux aspects économiques et sanitaires ou encore d’égalité et de cohésion des territoires. Le Sénat et le HCC estiment qu’une évaluation complète de tous les impacts de cette technologie aurait dû précéder sa mise œuvre.
L’impact carbone de la 5G, c’est-à-dire la quantité de GES qu’elle génère, dépendra des modalités de son déploiement, de l’évolution du parc de terminaux et des usages. Il englobe les émissions produites sur le territoire national et les émissions importées. La 5G pourrait alourdir de 2,7 à 6,7 millions de tonnes équivalents CO2 (Mt éqCO2) l’empreinte carbone du numérique en France, qui s’élève à 15 Mt éqCO2 en 2020.
L’impact carbone de la 5G résulterait :
- pour les trois-quarts, de la mise en place des infrastructures, des terminaux et des centres de données, réalisée principalement à l’étranger ;
- pour un quart, de l’utilisation des équipements numériques, qui repose sur une électricité en partie française. La production électrique en France, largement décarbonée, rejette peu de GES. L’introduction de la 5G augmenterait la production et la consommation d’électricité. Elle risque de freiner la trajectoire de la France vers la neutralité carbone.
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Maîtriser l’empreinte carbone de la 5G
Le Haut conseil préconise ainsi de :
- clarifier les enjeux climatiques de technologies telles que la 5G en amont de leur déploiement ;
- obliger les opérateurs disposant de fréquences 5G à maîtriser l’empreinte carbone ;
- adapter l’offre d’électricité à la hausse attendue de la demande et d’anticiper les répercussions sur le Système européen d’échange de quotas d’émission (SEQE)(nouvelle fenêtre), qui encadre les émissions liées à la production électrique dans l’Union européenne (UE) ;
- limiter les émissions importées liées au numérique, qui ne sont soumises à aucun mécanisme de réduction (la France peut aussi inciter l’UE à imposer des normes de durabilité et de réparabilité aux équipements électroniques mis sur le marché) ;
- sensibiliser et responsabiliser les usagers du numérique (particuliers et entreprises) aux bonnes pratiques permettant d’économiser l’énergie.
Six questions sur le lancement de la 5G
La procédure de sélection pour l’attribution des fréquences de la 5G a été lancée le 31 décembre 2019. Le calendrier initial a été retardé en raison de la crise sanitaire. Les enchères pour les opérateurs mobiles commencent le 29 septembre 2020. Tour d’horizon des questions soulevées par le déploiement de cette nouvelle technologie.
Qu’est-ce que la 5G ?
La 5G est le futur standard des communications mobiles, dit de 5e génération. Cette technologie s’annonce plus performante en termes de débit, de délai de transmission et de fiabilité.
Contrairement à la 3G et à la 4G, son utilisation ne se limite pas aux réseaux mobiles. Elle ouvre des perspectives pour le développement des usages numériques. Les nouvelles performances permettent une expansion des possibilités notamment en termes de services et d’applications numériques : voiture autonome, objets connectés, télémédecine, etc.
Quel est le rôle de l’Arcep dans le déploiement de la 5G ?
Autorité administrative indépendante (AAI), l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep)(nouvelle fenêtre) assure la régulation des communications électroniques. Elle est parfois appelée « gendarme des télécoms ». Elle attribue notamment les ressources en fréquence et a pour mission de préparer le déploiement de la 5G en France.
L’Arcep a défini le nombre de bandes de fréquences qui pourront être utilisées par la 5G. Le 21 novembre 2019, elle a publié sa proposition de cahier des charges pour l’attribution des fréquences dans la bande 3,4-3,8GHz. L’Arcep a rendu un avis sur les conditions financières de l’appel à candidatures proposées par le gouvernement.
La procédure de sélection de l’attribution des fréquences(nouvelle fenêtre) a été lancée le 31 décembre 2019. Elle est conduite par l’Arcep.
Quelle est la procédure d’attribution des fréquences pour la 5G ?
31 blocs de fréquences de 10 MHz sont en jeu et sont attribués en deux étapes :
- dans une première phase, un bloc de fréquences de 50 MHz est distribué contre des engagements optionnels. Le prix de réserve déterminé par le gouvernement est de 350 millions d’euros par bloc de 50 MHz. Quatre candidats ont été retenus : Bouygues Telecom, Free Mobile, Orange, SFR ;
- une enchère multi-tours est organisée pour attribuer 11 blocs de 10 MHz dans la bande 3,4-3,8 Ghz. Initialement prévue en avril, cette enchère est lancée le 29 septembre. L’ouverture commerciale de la 5G se fera ensuite à l’initiative des opérateurs.
La Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat(nouvelle fenêtre) a accueilli favorablement les modalités de déploiement. Toutefois, le prix de réserve des enchères retenu « pourrait limiter l’intensité concurrentielle sur le marché ».
Qu’apporte la loi sur la sécurisation des réseaux ?
Promulguée le 1er août 2019, la loi visant à préserver les intérêts de la défense et de la sécurité nationale de la France dans le cadre de l’exploitation des réseaux radioélectriques mobiles, aussi appelée « loi 5G »(nouvelle fenêtre), introduit un nouveau régime d’autorisation préalable pour l’utilisation de dispositifs de réseaux 5G par les opérateurs. Cette loi répond aux nombreuses inquiétudes de possibles risques d’espionnages ou de sabotages.
En effet, les spécificités techniques propres à la 5G sont susceptibles d’accroître les vulnérabilités des réseaux. Les réseaux 5G offrent une plus grande surface de vulnérabilité à d’éventuelles attaques en raison de leur grande ramification, qui va supposer la multiplication des antennes, des capteurs et des nœuds informationnels. Potentiellement, chaque antenne peut devenir une partie sensible du réseau alors que les réseaux 3G et 4G étaient centralisés. Des craintes sont également exprimées sur la sécurité des équipements commercialisés par des équipementiers. Par exemple, les États-Unis ont pris des mesures à l’encontre de l’équipementier chinois Huawei.
La loi prévoit que toute activité d’exploitation de certains équipements radioélectriques est soumise à une autorisation préalable du Premier ministre. Les demandes d’autorisation sont traitées par l’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information (ANSSI). Une autorisation peut être refusée s’il existe « un risque sérieux d’atteintes aux intérêts de la défense et de la sécurité nationale ».
La 5G présente-t-elle un risque pour la santé ?
La 5G est similaire aux autres technologies des générations précédentes, elle sera donc soumise aux mêmes limites réglementaires concernant les expositions aux ondes.
La 5G utilise une bande de fréquences plus haute que le réseau 4G avec une portée des ondes plus courte. La 5G va donc nécessiter l’installation de nombreuses antennes. La multiplication des antennes fait craindre une augmentation de l’exposition aux radiofréquences. Des antennes adaptatives devraient cependant réduire le rayonnement des ondes.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) est chargée d’évaluer l’exposition de la population aux champs électromagnétiques liée au déploiement de la 5G et les effets sanitaires associés à cette exposition. L’Anses a publié un rapport intermédiaire le 26 janvier 2020(nouvelle fenêtre). Elle y souligne la nécessité de disposer du maximum d’informations techniques de la part des industriels impliqués afin de pouvoir définir des scénarios d’exposition des populations et d’évaluer l’impact sanitaire éventuel. Elle identifie également deux nouveaux champs d’évaluation des risques liés aux deux nouvelles bandes de fréquences utilisées par la 5G (3,5 GHz et 26 GHz). Les résultats des travaux d’expertise lancés par l’Anses seront disponibles au premier trimestre 2021.
Le rapport d’inspection sur les aspects sanitaires et techniques de la 5G précise que « les éléments disponibles à ce jour permettent d’estimer que l’introduction de la 5G en bande 3,5 GHz avec antennes actives ne générera pas de rupture en matière d’exposition dans les zones urbaines, où elle sera majoritairement déployée, par rapport aux évolutions observées avec les réseaux existants, mais peut contribuer à une augmentation du nombre de points atypiques, ce qui devra faire l’objet d’une vigilance particulière. Le recours ultérieur à la bande autour de 26 GHz amènera des effets nouveaux restant à documenter ».
Quel peut être l’impact environnemental de la 5G ?
La 5G, comme la 4G avant elle, va contribuer à une consommation accrue de données. L’augmentation des performances entraînera aussi une nouvelle utilisation du numérique. Le déploiement de la 5G risque d’accroître la consommation énergétique pour la production de données et la pollution numérique.
La feuille de route élaborée par le Conseil national du numérique cadre le développement numérique. Les cinquante mesures du texte vise à maîtriser le déploiement de la 5G et son impact environnemental en respectant le développement numérique sobre, responsable et au service de la transition écologique.
Les défenseurs de la 5G considèrent que l’architecture décentralisée de la 5G va permettre des économies d’énergie, les données n’étant plus forcément traités dans des sites centralisés.
Dans Le Journal du dimanche du 13 septembre 2020, 68 élus de gauche et écologistes ont signé une tribune pour demander un moratoire sur l’attribution des fréquences. Le chef de l’État leur a répondu, le lendemain, que la France allait prendre le tournant de la 5G (« J’entends beaucoup de voix qui s’élèvent pour nous expliquer qu’il faudrait relever la complexité des problèmes contemporains en revenant à la lampe à huile ! Je ne crois pas que le modèle amish permette de régler les défis de l’écologie contemporaine« ).
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