Un appel aux habitants du Lot à se mobiliser pour la révision de la loi bioéthique
Bernard Charles, souligne les enjeux que représentent « Les États Généraux de la bioéthique » et invite les Lotois à s’exprimer nombreux sur cette problématique.
Bernard Charles – député honoraire, ancien président de la Commission parlementaire de la révision des lois bioéthiques, souligne les enjeux que représentent « Les États Généraux de la bioéthique ». Tout en faisant part de son propre point de vue, il invite les Lotois à s’exprimer nombreux sur cette problématique.
« Les États Généraux de la bioéthique ont débuté le 18 janvier 2018 sous l’égide du CCNE (Comité Consultatif National d’Éthique) en vue de réviser les lois bioéthiques françaises. Ces procédures de révision sont controversées par certains mais elles sont nécessaires vu les progrès de la science. La bioéthique est en effet l’étude des problèmes éthiques posés par les avancées en matière de biologie et de médecine ; elle n’est donc pas statique mais évolutive en fonction de la société.
La large concertation prévue par la loi, les législateurs l’ont voulue pour que l’ensemble de la société soit concernée grâce à un échange citoyen avant la décision. Elle sera finalisée à l’été 2018. Après cette concertation, le dépôt de cette loi au Parlement est attendu à l’automne pour une adoption au premier trimestre 2019.
À l’issue d’une réflexion régionale dans les espaces de réflexion éthique le CCNE fera la synthèse de ces avis et les remettra à l’office d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST).
« Que le maximum de citoyens participent »
Cette grande consultation sera clôturée par un événement national en juillet prochain, soit 7 ans après la dernière loi bioéthique. Parallèlement à tout cela, un site Internet permettra de recueillir les avis des citoyens et l’Agence de biomédecine et le Conseil d’État devront également rendre un rapport. Les thèmes étudiés concernent bien sûr le progrès médical mais aussi les fondements mêmes de notre société. C’est pour cette raison qu’il est souhaitable que le maximum de citoyens participe à ce débat car il ne doit pas se limiter à des débats d’experts. Ces thèmes sont nombreux : l’accès à la PMA, la fin de vie, le développement des tests génétiques, le dépistage préconceptionnel des maladies, la prise en charge des personnes âgées et handicapées, le partage des données de santé, le don d’organes, les neurosciences, l’intelligence artificielle. Mais aussi la nécessaire réaffirmation d’un pilier incontournable de l’éthique française : la gratuité du don du corps, c’est-à-dire du vivant sous toutes ses formes (organes, sang, gamètes, etc..) et l’anonymat de ce don.
La définition de l’homme est posée par les énormes progrès scientifiques mais aussi par sa protection : le corps est-il une simple marchandise ou quelque chose d’inaliénable et de sacré ? Les principaux enjeux dans ce débat qui vont mobiliser notre société sont la Procréation Médicalement Assistée (PMA) et la fin de vie mais aussi la discussion sur la GPA (Gestation Pour Autrui). Face à certains courants obscurantistes et rétrogrades il faut savoir que la société française connaît, comme d’autres pays, un mouvement de libéralisme culturel digne de l’héritage des lumières.
L’évolution de l’opinion publique vis-à-vis des mères porteuses et de la PMA en est la démonstration. Tout cela est accentué par la montée de l’individualisme et des progrès scientifiques. Chacun veut faire ce qu’il veut s’éloignant des traditions judéo-chrétiennes de notre continent. On le retrouve dans les résultats de récents sondages (95 % des Français sont pour le suicide assisté en fin de vie, 56 % sont favorables à la PMA pour les couples de femmes, 59 % sont favorables aux mères porteuses pour les couples de lesbiennes). Les lois belges sur la PMA, la GPA et l’euthanasie illustrent pleinement cette grande évolution.
« Malgré la loi, il n’y a pas de vrais services palliatifs dans le Lot »
Sur la fin de vie, la loi Léonetti de 2005 a précisé : l’accès pour tous aux soins palliatifs : il faut remarquer qu’en région Occitanie malgré la loi, des départements comme le Lot n’ont pas de vrais services de soins palliatifs. Se pose la diffusion de la culture palliative chez les praticiens ? et de l’information des citoyens.
L’autorisation de « laisser mourir » par l’arrêt des soins et de l’alimentation artificielle a été fort discutée et est éthiquement inacceptable par beaucoup de médecins. La fin de vie ne peut être limitée au seul monde médical mais elle doit être réappropriée par la société civile. Pour ma part, je pense qu’il faut respecter la vie humaine mais la respecter c’est aussi lui permettre d’être humaine jusqu’au bout tout en ayant à sa disposition si on le souhaite un service de soins palliatifs. Quand les soins palliatifs ne suffisent plus le patient doit pouvoir choisir le moment du départ parce que tout aura été fait (les directives anticipées sont essentielles et opposables au corps médical). La légalisation de la PMA pour les couples homosexuels femmes ou pour les femmes seules ne devrait pas poser de problème puisque le don du sperme est accepté par la société.
Cela découle aussi de l’évolution de la société et du mariage pour tous. Cette légalisation seulement destinée aux femmes pose, c’est vrai, un problème d’égalité par rapport aux couples homosexuels hommes et aux hommes seuls désireux d’avoir une descendance. Le problème n’est pas dans le don d’ovules qui est déjà légalisé mais dans la GPA, la gestation pour autrui. La GPA risque d’être une prise d’otage des femmes les plus démunies, c’est-à-dire l’exploitation mercantile du corps de la mère porteuse devenue pour certains « mères pondeuses ». Le prix à payer pour demander un tel service est incompatible avec notre exigence intangible de la gratuité, de la dignité, et de la non- marchandisation de la personne car le risque est trop grand et on ne doit pas le prendre comme l’a précisé d’ailleurs le Conseil d’État dernièrement. Pour l’homme, l’accès à la parentalité est acceptable, l’adoption peut être une autre solution évitant le très grand risque de la GPA.
La Convention de La Haye interdit tout arrangement programmant à l’avance l’abandon de l’enfant par sa mère de naissance et tout paiement par les parents adoptifs. Elle a rappelé ce principe intangible.
On le voit : des choix de société lourds sont présents dans cette préparation de la nouvelle loi bioéthique, chacun doit se mobiliser pour défendre ses propres points de vue qui sont tous respectables. La responsabilité du législateur est grande car le respect des droits de la personne et de son corps est essentiel pour une société civilisée. La plupart des pays européens ont rejeté ce « marché total ». La France doit les suivre dans cette voie. »
BERNARD CHARLES
http://www.vie-publique.fr/forums/etats-generaux-bioethique.html
Un site internet, géré par le CCNE, est dédié aux États généraux (https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/). Depuis le 12 février 2018, chaque citoyen peut s’y informer et exprimer en ligne sa propre opinion.
Le débat sur l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes continue de diviser même si, selon plusieurs sondages récents, six Français sur dix s’y disent désormais favorables (contre seulement 24% en 1990).
Le thème a été au centre des discussions des États généraux de la bioéthique. Si aucun consensus n’a pu aboutir lors des consultations et auditions qui se sont déroulées de janvier à mai 2018, le Comité consultatif national d’éthique se déclare favorable à l’ouverture de la PMA dans sa contribution terminale à la révision de la loi de bioéthique, présentée en septembre 2018.
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