Un tronc de 13 m pour remplacer la queue du moulin
En 2017, le moulin à eau de Brousse fếtait ses 400 ans ainsi qu’une belle histoire de famille. Francis et Jean-Pierre Moles, représentants de cette lignée de meuniers de 1617 à nos jours, continuent de faire vivre ce moulin. Depuis quelques semaines, en plus de leur vente de pain hebdomadaire, quelques producteurs locaux (fromages, conserves, légumes, vins, charcuterie…) sont aussi au rendez-vous afin de proposer tous les mercredis un petit Drive. Père et fils connaissent les moulins sur le bout des doigts. Ils sont aussi les gardiens de savoir ancestraux comme le piquage ou le cerclage de meules.
Le moulin à eau de Brousse dont l’activité est surtout de produire de la farine n’est pas connu pour une de ses activités annexes. En effet, l’énergie hydraulique a permis, dans le temps, d’adjoindre au moulin une scierie. Lundi 8 juin, en tout début de matinée, se jouait un drôle de manège au moulin de Brousse.
« Quand il a fallu refaire le toit du moulin de Boisse, la commune de Sainte-Alauzie a fait passer un appel d’offre. Sur trois réponses c’est l’entreprise « La tournée du coq » qui a été retenue. Le toit a été refait aux environs de 2012 et depuis cette même entreprise est intervenue à chaque accident du moulin (ailes brisées en 1999 et 2015). En janvier 2019, l’architecte des bâtiments de France est venu voir le toit du moulin et a conseillé de conserver tous les vieux bois possibles. Dans ce sens, l’entreprise « la tournée du coq » avait conservé la partie intérieure de la queue du moulin qui était en bon état et la partie extérieure a été remplacée. Lors de la mise au vent, le lundi de Pâques en 2019, il y a eu des craquements sinistres qui se sont fait entendre sous le toit. Aussitôt, l’équipe a arrêté de manœuvrer. Francis Moles est monté dans la charpente et a constaté les dégâts… Fissure au niveau de la queue et impossibilité de faire tourner le toit. C’est pour cette raison que les ailes sont à l’arrêt depuis ce jour et qu’elles ont toujours la même orientation » a expliqué Thérèse Rességuié-Lacalmontie, présidente de l’AMBC.
Retrouver une pièce en chêne afin de remplacer la queue du moulin n’a pas été évident. Mais c’est grâce à Francis Moles et à son réseau de connaissance qu’a pu être trouvée un tronc de 13 m qui convenait. Dès réception de la pièce au moulin il ne manquait plus qu’à trouver l’équipe pour découper cette belle pièce.
L’entreprise « la tournée du coq » était donc présente pour superviser cette opération périlleuse. Après être revenu, encore une fois prendre les mesures nécessaires pour la découpe c’est toute une joyeuse équipe qui s’est attelée à charger, caler, tourner, scier ce tronc hors norme. Ce n’est pas si souvent que l’on peut assister à ce genre de découpe. Et l’on pouvait voir toute l’attention, la précision, que chacun mettait pour la découpe. L’histoire d’amour entre les hommes et les moulins est loin d’être finie dans notre cher Quercy Blanc. Maintenant rendez-vous pour la dépose de la nouvelle queue du moulin.
L’histoire du moulin
Parler du moulin de Brousse, c’est entrer dans l’histoire d’un site, d’une famille et d’une industrie rurale traditionnelle qui s’est adaptée à la vie moderne. Le moulin de Brousse est situé sur la Grande Barguelonne à Castelnau-Montratier à proximité du site gallo-romain au lieu-dit «Le Souquet». Cette ancienneté du site explique la qualité de la situation du moulin qui bénéficie d’un dénivelé im-portant explicable par la déviation probable du lit de la rivière en amont du mou-lin à l’ époque gallo-romaine.La période de construction du moulin reste inconnue mais certainement bien antérieure à l’arrivée de la famille «Moles» dans ses murs en 1617. Depuis, le savoir-faire est transmis de génération en génération. «avant d’être propriétaire du moulin de Brousse, on était ouvrier dans les moulins.» Le nom de Moles («meules» en occitan) est répandu chez les meuniers.Autrefois, comme tous les moulins du Quercy blanc, le moulin de Brousse avait aussi son moulin à vent as-socié. Il était situé sur le plateau à 3 kilomètres. Mais il était peu utilisé car le vent était rarement favorable. Il a été démoli en 1930. Le moulin possède également une scierie encore aujourd’hui complète, conçue par le père de Francis Moles, en exploitation durant cinquante ans de 1937 à 1987. Pendant quelque temps, le moulin a aussi pro-duit de l’électricité en 110 volts pour éclairer les longues soirées d’hiver avant l’arrivée du réseau en 1955.Une caractéristique du moulin de Brousse est la proximité du seuil avec le moulin lui-même, une alimentation en eau régulée par deux larges vannes . La première, évacue l’eau dans un bassin en contrebas qui rejoint le lit, et la deuxième vanne plus récente, accolée au seuil, qui est électrifiée. Les deux vannes ont la carac-téristique d’avoir la double fonction de vanne de décharge en la relevant entièrement, pour que l’eau s’écoule par le fond, et de vanne de niveau en modifiant par le dessus la hauteur de la vanne enfoncée. Cette vanne comprend deux parties, basse et haute, qui coulissent l’une sur l’autre.La partie motrice du moulin est classique avec deux rouets entourés d’un cylindre. Les vannes ouvrières sont manœuvrées à partir de tiges et d’un levier. La partie motrice du moulin fonctionne toute l’année, un moteur élec-trique supplée les insuffisances hydriques.Le savoir-faire du meunier est d’abord dans la qualité de la farine due au grain, au dosage de l’alimentation des meules, à la taille des meules, à leur vitesse de rota-tion et à leur écart. La mouture à la sortie des meules est fréquemment observée et palpée pour apprécier le son qu’elle contient. Elle est ensuite envoyée automatique-ment dans la bluterie. A l’entrée du tambour, par la trémie, s’écoule la farine la plus fine appelée «fleur de farine» avec le son qui s’écoule en bout.La boulangerie est installée dans un vieux bâtiment qui longe le canal de déverse de la première la vanne. Elle possède principalement deux fours traditionnels voûtés en brique, et un four moderne.Héritiers d’une tradition et d’une installation qui a traversé les époques, Francis Moles et son fils Jean-Pierre font partie d’une famille où chaque génération a eu le courage de transmettre un savoir-faire sans cesse renouvelé, perfectionné et adapté.Alors qu’on observe une prise de conscience de la nécessité de lutter contre le réchauffement climatique, avec des énergies renouvelables et des produits naturels de proximité, il faut constater que ceux qui s’inscri-vent dans ce schéma ne sont pas encouragés comme ils devraient l’être.Souhaitons à Francis et surtout à Jean-Pierre Moles le meilleur avenir pour le moulin de Brousse.Le moulin de Brousse est l’exemple-même de la tradition meunière vivante que l’association des moulins du Quercy a toujours voulu soutenir et à qui nous souhaitons longue vie.16
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